Réduction de CO2 dans le portefeuille en CHF : la quadrature du cercle ?
Le service de gestion d'actifs de la Zürcher Kantonalbank gère également des investissements en actions, en obligations et en biens immobiliers suisses. En raison des spécificités du marché domestique, il est difficile de doter les portefeuilles en CHF d'une trajectoire de réduction continue des gaz à effet de serre. Nos explications.
La plupart des produits de placement Swisscanto gérés activement (fonds de placement et groupes de placement) des lignes de produits « Responsible » et « Sustainable » sont assortis d'une trajectoire de réduction des émissions de CO2. Cela signifie que les émissions de CO2e d'un portefeuille doivent diminuer d'au moins 4% par an. L'application de la trajectoire de réduction du CO2 à un portefeuille en CHF uniquement présente toutefois quelques défis.
C'est le cas des produits d'investissement durable qui investissent majoritairement dans des entreprises suisses à forte capitalisation du SMI. Ces dernières présentent un grand avantage en termes d'intensité de CO2e par rapport au cimentier Holcim. La production de ciment est en effet très gourmande en énergie. Holcim a donc une intensité de CO2e de 2’722 tonnes de CO2e par million de chiffre d'affaires (en USD). C'est environ cinq fois plus que l'intensité de CO2e de l'entreprise suivante, Vetropack Holding. Holcim est responsable à lui seul de 82% de l'intensité de CO2e de l'ensemble du Swiss Performance Index (SPI) (en mars 2024). Le SPI compte environ 210 titres, Holcim ne pèse que 2,8%.
Simple et difficile à la fois
En raison de l'importante empreinte carbone de Holcim, une légère sous-pondération de Holcim au niveau du portefeuille dans un portefeuille d'actions suisses de grande capitalisation ou d'obligations suisses peut entraîner une réduction significative des émissions de CO2. En même temps, il est presque impossible de surpondérer l'action.
C'est regrettable, car l'entreprise a mis en place plusieurs mesures de réduction et fait vérifier ses objectifs par la Science Based Target Initiative. Par exemple, Holcim veut réduire ses émissions de CO2 par tonne de ciment de 22% d'ici à 2030 par rapport à l'année de référence 2018. En 2022, Holcim a atteint une réduction de 4,8%. La même année, elle a également cédé des actifs en Inde et au Brésil, ce qui a entraîné une réduction totale de 37% de l'intensité en 2022 par rapport à 2021.
Dans un contexte global et régional, une décision d'allocation peut être prise sur la base d'une plus grande diversification au sein d'un groupe de référence. Cela signifie surpondérer des entreprises comme Holcim et sous-pondérer les entreprises de ciment sans plan de transition et avec des intensités plus élevées. Toutefois, cette option n'existe pas dans l'univers d'investissement suisse, car il n'y a pas d’autre cimentier.
Un univers restreint pour les petites et moyennes capitalisations suisses
Les petites et moyennes capitalisations suisses sont également confrontées à des défis. Le SPI Extra compte environ 190 titres. Cependant, une bonne moitié d'entre eux sont peu liquides. Dans les faits, seuls 90 titres environ sont suffisamment liquides pour être investis.
Si le portefeuille suit à présent une trajectoire de réduction des émissions de CO2 en fonction de l'Accord de Paris sur le climat, il risque de rencontrer des difficultés à moyen terme. En effet, l'intensité en CO2 de ces entreprises est déjà très faible. De plus, la dispersion des intensités de CO2e, c'est-à-dire les différences d'émissions de CO2 entre les différentes entreprises, est moins prononcée dans le segment des petites et moyennes capitalisations que dans celui des grandes entreprises. Les possibilités de réduction des émissions de CO2 par le biais de sélections de titres sont donc limitées. Pour atteindre les objectifs climatiques définis, on dépend donc principalement des contributions de réduction de CO2e induites par le marché. Mais le fait est que la décarbonation de l'économie mondiale progresse trop lentement. C'est notamment pour cette raison que nous sommes passés d'un objectif de <2 degrés à une approche de réduction relative des émissions de CO2e pour les produits de placement de Swisscanto axés sur les petites et moyennes capitalisations suisses.
Le choix est également limité pour les placements immobiliers indirects suisses. Dans cette classe d'actifs, nous investissons à la fois dans des sociétés immobilières cotées et dans des véhicules immobiliers collectifs. L'univers de placement comprend environ 15 à 20 sociétés immobilières cotées et une centaine de véhicules collectifs. Comme ces véhicules collectifs sont principalement gérés par des tiers, l'Asset Management de la Zürcher Kantonalbank n'a pas d'influence directe sur la réduction des émissions de CO2e . C'est pourquoi nous n'avons pas défini d'objectif <2° dès le départ pour cette stratégie activement responsable, mais une réduction continue des émissions de CO2e sans objectif quantitatif.
Plus de latitude avec les scopes 3 et 4 ?
L'introduction des données du scope 3 offre aux gestionnaires de portefeuille une plus grande marge de manœuvre pour réduire en permanence l'intensité carbone d'un portefeuille. La comptabilisation du scope 3 est plus complète et peut permettre une meilleure différenciation entre les secteurs, mais la méthode de comptabilisation peut également conduire à certains résultats indésirables.
Les données de scope 4 devraient également être prises en compte afin que les fournisseurs de produits et de services faibles en carbone ne soient pas systématiquement désavantagés. Les émissions de scope 4 sont les émissions évitées grâce à l'utilisation ou à la mise en œuvre de produits, services ou technologies à faible émission ou à faible teneur en carbone. Malheureusement, la disponibilité des données est encore très limitée.
Dans notre prochain blog, nous examinerons plus en détail les défis et les opportunités des données de scope 3 et 4.